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La Maison éclusière Saint-Pierre
Type de projet
Photo
Date
6 avril 2022
Rédacteur
Sébastien VAISSIÈRE
Photographe
Francois PASSERINI
Les murs de la maison éclusière Saint-Pierre sont debout depuis 240 ans. Avant leur rénovation récente, pour la création d’un lieu culturel inauguré le mois dernier, on entendait leurs briques effritées chuchoter la mémoire des lieux : la fumée noire des tracteurs à vapeur du XIXe, les cris du résistant Lucien Lombard sous les coups des flics de Vichy, la silhouette des éclusières, le rire des enfants qui ont grandi sur place, la présence éphémère de Cécile Nougaro, les installations arty du Printemps de Septembre, et le souvenir impérissable d’une cascade de cinéma.
Tracé dans les années 1770 pour éviter aux embarcations le franchissement périlleux de la chaussée du Bazacle, le Canal de Brienne relie le bassin des Ponts-jumeaux à la Garonne. Ses chemins de halage comptent parmi les sites de promenade les plus agréables du centre-ville. Y passent, en fonction de l’heure et de la saison, joggueurs, marcheurs, velotafeurs infatués, flâneurs, cyclotouristes, colverts, étudiants de TSE, ragondins débonnaires, fêtards beurrés et fumeurs de joints
Le canal se jette dans le fleuve derrière la place Saint-Pierre, par la grâce de l’écluse du même nom. À la fin du XVIIIe, on a bâti à hauteur de l’écluse une maison de 500 m2 pour abriter le matériel et héberger les familles des éclusiers. Le bâtiment comprend un immense hangar en L (occupé désormais en partie par la salle de spectacle et les cuisines), où l’on a rangé outils, chevaux, tracteurs à vapeur, et plus tard automobiles et camionnettes. Il en fut ainsi jusqu’en 2002, date à laquelle le dernier occupant des lieux, Gérard Roche, a rendu les clefs.
Dessinateur aux Ponts et Chaussées, ce dernier a longtemps œuvré à l’entretien du canal au sein du service de la navigation de Toulouse : « L’eau sape, érode et se faufile partout. Il faut sans cesse remettre en état, réparer, consolider » résume-t-il. Sur le Canal, chaque pont, chaque port, chaque écluse sur laquelle il intervenait donnait l’occasion de mesurer le talent de Riquet : « Son génie est immense. Il est le premier véritable architecte hydraulique. Même le grand Vauban regrettait de ne pas avoir été le créateur du Canal! »
Quand il se marie au début des années 1970, il sollicite un logement auprès de sa direction. C’est ainsi qu’il arrive à la maison éclusière Saint-Pierre. Lorsqu’on en pousse la porte en ce temps-là, on tombe sur trois appartements. Le premier occupé par les époux Galli, les éclusiers. Le second par la veuve Lombard, ancienne éclusière, dont les bons et loyaux services et la gloire du mari défunt, le résistant Lucien Lombard, justifie largement qu’on la laisse disposer de ce logement de fonction. Le couple Roche aménage dans le troisième. Le confort est spartiate et les commodités à l’extérieur.
Gérard Roche insiste pour que les services de la navigation prennent en charge les travaux d’assainissement : « Fin 70, chaque appartement avait son lavabo. Tout le monde était content ! » sourit-il. Comme il n’est pas manchot et que le personnel d’entretien du canal qui passe par la maison éclusière est de bon conseil, Gérard Roche se charge des autres travaux. Après le boulot, le week-end, il se fait maçon, plombier, électricien. Bientôt, la famille Roche, qui s’est agrandie avec l’arrivée de deux enfants, est la seule à profiter des lieux : Mme Lombard est morte, et le poste d’éclusier a été supprimé. « Nous occupions les 3 logements. C’était assez cocasse parce qu’aucun ne communiquait. Mais c’était merveilleux. Cet endroit a une âme. Sa cour est très agréable. C’est un pan de patrimoine toulousain. »
Dessinateur aux Ponts et Chaussées, ce dernier a longtemps œuvré à l’entretien du canal au sein du service de la navigation de Toulouse : « L’eau sape, érode et se faufile partout. Il faut sans cesse remettre en état, réparer, consolider » résume-t-il. Sur le Canal, chaque pont, chaque port, chaque écluse sur laquelle il intervenait donnait l’occasion de mesurer le talent de Riquet : « Son génie est immense. Il est le premier véritable architecte hydraulique. Même le grand Vauban regrettait de ne pas avoir été le créateur du Canal! »
Quand il se marie au début des années 1970, il sollicite un logement auprès de sa direction. C’est ainsi qu’il arrive à la maison éclusière Saint-Pierre. Lorsqu’on en pousse la porte en ce temps-là, on tombe sur trois appartements. Le premier occupé par les époux Galli, les éclusiers. Le second par la veuve Lombard, ancienne éclusière, dont les bons et loyaux services et la gloire du mari défunt, le résistant Lucien Lombard, justifie largement qu’on la laisse disposer de ce logement de fonction. Le couple Roche aménage dans le troisième. Le confort est spartiate et les commodités à l’extérieur.
Gérard Roche insiste pour que les services de la navigation prennent en charge les travaux d’assainissement : « Fin 70, chaque appartement avait son lavabo. Tout le monde était content ! » sourit-il. Comme il n’est pas manchot et que le personnel d’entretien du canal qui passe par la maison éclusière est de bon conseil, Gérard Roche se charge des autres travaux. Après le boulot, le week-end, il se fait maçon, plombier, électricien. Bientôt, la famille Roche, qui s’est agrandie avec l’arrivée de deux enfants, est la seule à profiter des lieux : Mme Lombard est morte, et le poste d’éclusier a été supprimé. « Nous occupions les 3 logements. C’était assez cocasse parce qu’aucun ne communiquait. Mais c’était merveilleux. Cet endroit a une âme. Sa cour est très agréable. C’est un pan de patrimoine toulousain. »
Lorsque les Roche quittent la maison en 2002, elle est dans un état correct et tout à fait habitable. Mais plus aucune famille ne viendra vivre sur place. 20 ans plus tard, au moment de rénover l’ensemble, c’est dans une maison au plancher branlant, au toit fendu et aux murs délabrés, que sera donné le premier coup de pioche du futur lieu culturel qui a ouvert le mois dernier.
Gérard Roche s’est installé dans la maison éclusière au début des années 1970. Il en est le dernier résident et la mémoire vivante.
Gérard Roche s’est installé dans la maison éclusière au début des années 1970. Il en est le dernier résident et la mémoire vivante.
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Avant la Deuxième Guerre Mondiale, l’éclusière est une certaine Mme Lombard. Elle vit dans la maison avec ses deux enfants et son mari Lucien, qui travaille dans un atelier de charpentes métalliques près de la prison Saint-Michel. Le rôle de l’éclusière est crucial à cette époque. Mme Lombard actionne l’écluse quand passent les bateaux, notamment les péniches qui transportent les engrais de l’Onia. Quand les eaux du fleuve menacent, c’est elle qui relève le garonomètre, et informe chaque jour la préfecture de la situation, depuis les cabines des P&T de la rue Lafayette.
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On le mène chez lui. L’ensemble du bâtiment est fouillé. Ne trouvant rien, et devant son silence, il est molesté dans le hangar. On le conduit à la prison Saint-Michel où les coups pleuvent à nouveau. Il est transféré quelques semaines plus tard à la prison de Villeneuve-sur-Lot. Il y meurt sous la torture le 30 mars 1942. » Aujourd’hui, le quai reliant Daurade à Saint-Michel, porte son nom.
Dans les années 1980 se tient chaque année à Toulouse un grand festival mondial des cascadeurs de cinéma. Les cascadeurs de Mad Max, Indiana Jones ou Batman viennent ainsi réaliser des cascades dans la Ville rose pendant un peu moins de 10 ans. Une année, une grande cascade est tournée dans et autour de la maison éclusière. Une voiture démarre en trombe du hangar, dévale les escaliers jusqu’au chemin de halage, et file vers les Ponts-Jumeaux.
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