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Atlantique vs Méditerranée : Bons arguments et mauvaise foi

Autant le dire tout de suite, clichés et poncifs sont légion lorsqu’il s’agit de défendre sa patrie ou de caricaturer la partie adverse. Ainsi, quand on demande aux professionnels du tourisme du littoral Atlantique leurs visions de la côte méditerranéenne, ils n’ont (la plupart du temps) qu’une réponse à la bouche : c’est bétonné ! Contrairement, bien entendu, à leur côte, « composée de plages sauvages et de grands espaces naturels ». Prenons Didier Chappaz des Côtes Landes Nature, qui se fait un malin plaisir d’insister sur la faible densité de son territoire : « Comme il n’y a pas de bouchon, pour aller à la plage il suffit de compter les kilomètres : on met cinq minutes pour faire cinq kilomètres, dix minutes pour dix kilomètres et ainsi de suite. Mais surtout, ici, on a de l’espace, il n’y a pas de barrière, les forêts ne sont pas clôturées, il n’y a pas de mur sur les plages. On peut s’égarer, mais on ne se perd jamais. » Jérôme Lay pour le Seignanx (Landes) enfonce le clou : « En Méditerranée il y a beaucoup de plages privées alors que chez nous la plage est un espace public et qu’il n’y a aucun moyen de la privatiser. » Une vision forcément un peu caricaturale que Jean-Michel Solé, maire de Banyuls-sur-Mer, met un point d’honneur à tordre : « On a en tête une côte bétonnée, mais de Collioure à Cerbère, c’est très découpé, préservé, avec plein de petites criques, des spots de plongée uniques au monde dans une réserve marine très préservée. »

Chez nous, on ne risque pas de tomber malade en sortant de l’eau ! 

Julie Campana de l’office de tourisme de Narbonne approuve : « Nous avons des paysages très variés en bord de mer, avec des lagunes et leurs flamants roses, des canaux, des massifs, de magnifiques petits villages de pêcheurs comme Bages ou Peyriac-de-Mer. » Et de contre-attaquer en rappelant que niveau ensoleillement, il n’y a pas photo : « Ici, les probabilités d’avoir des vacances 100 % soleil augmentent dès qu’on sort du périph’. Alors que aïe, aïe, aïe, le climat océanique… » Un argument battu en brèche par David Tran, responsable marketing à l’office de tourisme de Hossegor : « En Méditerranée, le climat est caniculaire. Ici, c’est beaucoup plus doux, plus agréable grâce au vent thermique. Au moins, on n’étouffe pas. » Un peu plus au sud, Christiane Bonnat Delahaie, du comité départemental du tourisme 64, abonde dans ce sens : « Chez nous, c’est très vert ! C’est la rançon des quelques bonnes averses, même estivales, que le ronchon en vacances nous reprochera toujours ! En attendant, c’est toute la gamme des verts qui se déploie sous nos yeux et l’assurance de trouver toujours de la fraîcheur… sans les moustiques ! »

Sauf que la chaleur, pour la baignade, c’est quand même préférable, ne manque pas de souligner Sophie Onieva, de l’office de tourisme de Banyuls : « Chez nous, on ne risque pas de tomber malade en sortant de l’eau ! » Son maire va plus loin : « Sur le littoral atlantique, on subit la marée, il y a de hautes vagues dans lesquelles on ne peut pas toujours se baigner. Alors qu’ici, on domine la mer. On peut se baigner tout le temps, et quand on va sur le ponton, le bateau est toujours dans l’eau… ce qui n’est pas toujours le cas là-bas ! »


Plus « dangereux » l’océan ? Tout est question d’interprétation pour Yves Ugalde, adjoint à la mairie de Bayonne, qui préfère parler de sa « tonicité » : « La vague nous oblige à être dans le défi physique. Mais c’est vrai que l’on ne se baigne pas dans un pédiluve un peu chaud. On ne se laisse pas flotter. »

Un avis que ne peut bien évidemment pas partager le maire de Banyuls-sur-mer pour qui « l’Atlantique est plus anglo-saxon que la Méditerranée, qui correspond davantage à l’état d’esprit des Toulousains. »

Chez nous, on ne trempe pas dans un pédiluve un peu chaud.

L’état d’esprit, le mot est lâché. Serait-il différent d’une rive à l’autre ? Sans vouloir jeter l’opprobre sur sa concurrente, Éric Soreau, adjoint au maire de Saint-Jean-de-Luz, sur la côte basque, pointe du doigt quelques différences : « Ici, nous sommes conviviaux et ouverts. Même les commerçants. Ils sont tellement fiers de leur ville qu’ils prennent le temps de partager leurs produits. Les touristes ne sont pas perçus comme des vaches à lait. Nous, le jambon, on le fait goûter avant de le vendre ! » « Dans le sud-est, outre le fait que les gens sont superficiels et très stressés, la vie y est beaucoup plus chère », renchérit David Tran, d’Hossegor. Un sentiment partagé par Aurore Cosnier, chargée de promotion de l’office de tourisme d’Anglet pour qui « en Méditerranée, il faut toujours sortir le porte-monnaie, même pour accéder à la plage ! » Pour Éric Soreau, il convient toutefois d’être honnête : « Au Pays Basque, il y a de l’argent, mais on ne le voit pas. Et même s’il y a des gens très connus, ce n’est pas du tout bling-bling. Contrairement à la Méditerranée. »

Le résumé est un poil simpliste… mais paradoxalement assumé par Jean-Michel Solé : « C’est sûr qu’en Méditerranée, on vit dehors, on est moins organisés, on se couche plus tard, on se lève plus tard, on fait plus de bruit. Au grand désarroi des maires, mais pour le plus grand plaisir des touristes. Alors c’est sûr que si on aime que tout soit propre, le beurre salé, les grandes plages de sable fin et de galets et les petites maisons bien ordonnées, mieux vaut aller en Atlantique ! » Et si, au fond, c’était Didier Codorniou, fin connaisseur du Pays Basque, qui était le plus honnête lorsqu’il dit aimer « Biarritz, Hendaye, les falaises, les vagues puissantes et le bleu foncé de l’océan qui contraste partout avec le vert franc de la végétation »… pour mieux faire remarquer que « la côte autour de Collioure rivalise sans problème avec les falaises du Pays Basque » ?


Didier Codorniou, maire de Gruissan « Notre lumière embellit tout ce qu’elle touche ! »

Donnez-nous envie de préférer la côte du Languedoc au littoral atlantique… 

Pour certains, la côte du Languedoc est irrémédiablement associée au béton. Pourtant, quand on y regarde de plus près, on s’aperçoit qu’elle est bien moins urbanisée que la côte atlantique. Seulement voilà, il faut faire un pas de côté pour découvrir les 40 000 ha de lagune, et le charme de l’arrière-pays.

Si on ne devait venir que pour une chose ?

La lumière ! Dense, puissante. Elle embellit tout ce qu’elle éclaire, génère des contrastes, des ombres marquées, modèle le paysage au fil des heures de la journée. Le paysage n’est rien sans la qualité de la lumière qui l’éclaire, et là… il n’y a pas photo. Quand on est né, comme moi, dans cette lumière, on est en manque dès qu’on la quitte. Même à Toulouse, la lumière de la Méditerranée me manque.

Votre argument imparable ?

J’ai rencontré quelqu’un récemment, qui venait de découvrir la côte, Gruissan, la Petite Camargue et notre arrière-pays, qui ressemble à la Toscane. Il m’a dit : « Surtout, je ne raconte à personne à quel point c’est beau. Je préfère garder ce privilège pour moi ! » Mon site préféré, c’est la plage de la Vieille-Nouvelle. Sauvage et paisible, près du grau de l’étang de l’Ayrolle. Pour moi, un résumé de ce que la Méditerranée a de plus beau à offrir.


Yves Ugalde, adjoint au maire de Bayonne « On embrasse moins et on serre plus fort la main ! »

Donnez-nous envie de préférer la côte atlantique au littoral languedocien… 

C’est un pays très diversifié, avec la mer et la montagne, moins dur d’un point de vue climatique, moins aride, plus vert avec une variété incroyable de paysages, contrairement aux étendues du bassin méditerranéen. Certes, ses entrées océaniques créent des incertitudes météorologiques, mais cela fait partie de notre charme : nous sommes imprévisibles.

Si on ne devait venir que pour une chose ?

L’authenticité. Au Pays Basque, on est peut-être moins dans l’effusion méditerranéenne mais davantage dans l’intensité de la relation, de ce que l’on a à défendre. On embrasse moins et on serre plus fort la main. On fait peut-être moins de bruit en parlant, mais plus en chantant.

Ce qui vous différencie de la Méditerranée ?

On ne tombe pas dans la facilité du tempérament méditerranéen, qui tape dans le dos tout de suite, qui est plus superficiel. Il y a une forme de vérité : le Pays Basque est assez ferme sur ses valeurs. Alors que de l’autre côté, on a un peu oublié ses racines pour tendre vers des modes hispaniques, notamment pour faire la fête.

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