À quel « récit oublié » le titre de l’exposition fait-il référence ?
À l’expédition menée par Pline l’Ancien lors de l’éruption du Vésuve qui engloutit Pompéi. Il était alors amiral de la flotte romaine basée à Misène, et prit la décision d’appareiller douze navires pour secourir les Pompéiens.
Cet épisode n’est-il pas, au contraire, l’une des histoires les plus fameuses de l’antiquité romaine ?
C’est le cas, en effet. Le titre de l’exposition a été choisi par des communicants ! Toutefois, il y a un fond de vérité dans cet énoncé. Alors que par le passé l’histoire des civilisations grecque et latine constituait une base de l’enseignement, on passe désormais très vite dessus à l’école. De ce fait, des histoires comme celle de Pline à Pompéi, qui étaient auparavant des références partagées par tous, ont tendance à tomber dans l’oubli.
Pourriez-vous rafraîchir nos mémoires d’oublieux ?
En 79, Pline l’Ancien a 56 ans. Cet homme de lettres, naturaliste et militaire, commande la flotte romaine basée à Misène, un port du golfe de Naples face à Pompéi. Quand le Vésuve entre en éruption, ce phénomène naturel spectaculaire le fascine. Il envisage dans un premier temps de se rapprocher du volcan par la mer pour satisfaire sa curiosité de naturaliste. Finalement, il se ravise et appareille 12 navires dans l’espoir de sauver des vies à Pompéi. Il mourra sur place, asphyxié. Cette expédition est le premier cas documenté de sauvetage de civils par une force militaire. Et c’est toute l’originalité de l’exposition que d’utiliser ce récit émouvant pour aborder les sujets traditionnels que sont la vie quotidienne à Pompéi et la suprématie maritime des Romains.
Quelle forme cela prend-il ?
Le visiteur vit heure par heure le déroulement de l’expédition et de l’éruption du Vésuve par le prisme de Pline. Cette approche permet une identification très forte au personnage, et nourrit les connaissances et l’imaginaire autant que l’émotion.
Que voit-on dans l’exposition, qui mérite le déplacement depuis Toulouse ?
Plus de 250 objets archéologiques issus de Pompéi et d’Herculanum. Une grande diversité d’œuvres, de fresques, de sculptures et d’objets de la vie quotidienne, exceptionnels par leur qualité de conservation. On voit aussi des moulages de corps de victimes qu’on découvre comme pétrifiées dans la posture qui était la leur au moment de leur ensevelissement sous la cendre. Ces moulages sont bouleversants, aussi bien pour la proximité qu’ils rendent possible avec des individus qui ont vécu voilà 2000 ans, que pour l’idée qu’ils donnent de leur occupation dans les derniers instants de leur vie.
La vie quotidienne des Pompéiens ressemblait-elle à celle des habitants de notre Narbonnaise ?
La Narbonnaise est la première province du territoire de la France actuelle à avoir été romanisée. En 79, sous le Haut-Empire, les modes de vie et l’architecture y étaient les mêmes que dans le reste de l’Italie. On peut donc se faire une idée de la vie dans notre région en explorant celle des Pompéiens. C’est intéressant pour le Musée de la romanité parce que nous y mettons l’accent, dans les collections permanentes, sur la vie de tous les jours et l’intimité des hommes et des femmes qui vivaient dans la région il y a deux millénaires. Un quotidien qui, considéré 2000 ans plus tard, est un formidable dépaysement historique et social.
Pompéi, un récit oublié, à partir du 6 avril au Musée de la romanité de Nîmes (Gard).