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Le chercheur qui traque le langage

  • Valérie RAVINET
  • il y a 8 heures
  • 2 min de lecture

Docteur en psychosociologie, l’enseignant chercheur Pascal Marchand se consacre à l’étude du langage et de ses mécanismes depuis le Laboratoire d'Études et de Recherches Appliquées en Sciences Sociales (LERASS) de l’Université de Toulouse III Paul Sabatier. Il multiplie également les contacts de terrain pour décrypter nos manières de penser.


Pascal Marchand - © Rémi Benoit
Pascal Marchand - © Rémi Benoit

Son fil rouge

Depuis le début de ma carrière, deux choses m’obsèdent : l’engagement et le langage. J’ai commencé par étudier les objecteurs de conscience radicaux, ceux qui refusaient à la fois le service militaire et ses alternatives. J’ai ensuite consacré ma thèse à l’engagement politique et à ses effets cognitifs, pour comprendre ce que vivent les individus qui s’engagent. Le langage est une porte d’entrée. Je me suis spécialisé très vite dans son traitement automatique, à une époque où cette technique était encore marginale en sciences humaines.


Les révélations du langage

Le langage ne dit pas seulement ce que l’on pense : il donne accès aux structures mentales qui le déterminent. J’ai étudié les discours de militants, de radicaux violents, de négociateurs de crise. Ce que j’essaie de capter, ce sont les logiques de bascule, les moments où tout peut changer. J’ai par exemple travaillé pour le RAID, l’unité d’intervention spécialisée de la police, pour analyser le langage dans les négociations de crise. C’est une recherche très concrète, qui passe par l’analyse linguistique et statistique des dialogues et la modélisation des échanges, pour repérer les mécanismes qui permettent la désescalade.


Décrypter l’influence en ligne et les cyber-attaques

Je fais partie des chercheurs impliqués dans l’Institut Cybersécurité Occitanie (ICO), je travaille principalement sur deux thématiques : le repérage automatique des messages malveillants, complotistes, sectaires et le phishing, ces messages frauduleux envoyés par des « ingénieurs sociaux » qui exploitent nos biais cognitifs. Nous avons identifié une quarantaine de stratégies de manipulation, l’une des plus classiques consistant à susciter une urgence fictive pour empêcher toute réflexion, par exemple : « le colis ne rentre pas dans votre boite aux lettres ». C’est là que j’essaie d’intervenir, dans la prise de conscience de la manipulation pour se redonner du pouvoir de vigilance. Réfléchir avant de cliquer peut éviter une catastrophe ; on ne se protège pas seulement avec de la technologie, je milite pour des « antivirus cognitifs ».


Son combat : défendre la pensée rationnelle

J’ai commencé à écrire une série de bandes dessinées sur l’histoire des sciences avec le dessinateur et auteur Jean-Benoît Meybeck. Grâce à cette BD, je suis sorti du champ strictement académique pour m'intéresser à la question de la pensée scientifique, rationnelle, dans un monde socio-numérique perturbé. L’un des messages de cette BD, c’est de rappeler que la science n’est pas une opinion parmi d’autres. Elle repose sur des méthodes. Et aujourd’hui, face au retour des pensées irrationnelles, pseudo-scientifiquesou complotistes, il faut le direet le redire.


Le premier tome de l’histoire des sciences, Eurêka, est paru aux éditions la Boite à Bulles – Vendu en librairie au prix de 22 €

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