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Les Carmélites : chapelle électronique

Dernière mise à jour : 12 janv.

C’est un dimanche hors normes  à la chapelle des Carmélites. Cette pépite architecturale désacralisée sise rue du Périgord est investie par un événement associant musiques électroniques et arts visuels, imaginé par l’association toulousaine Subkultur



Les flashs rouges et jaunes dansent sur les robes des quelques prêtres qui flânent. En ce premier dimanche de février, passé son porche un peu austère, la chapelle des Carmélites n’accueille pas de messe mais une communion d’un autre genre. Les hommes de foi observent les peintures du XVIIe siècle teintées par des halos de LED, alors que les enceintes font résonner de la house à un rythme de 120 battements par minute. L’atmosphère festive anime progressivement les saints sur la voûte, comme s’ils tombaient du ciel peint. Au fond, les DJs se succèdent, s’adonnant à de mystérieuses sorcelleries sur leur table de mixage. Une corbeille de fruits, un chandelier et des bougies les entourent.


Les basses se logent dans les oreilles des visiteurs, jeunes adultes affublés de bananes portées en bandoulière, familles avec enfants, personnes âgées. La foule tranquille se dandine en multipliant mouvements de tête. Iris, une jeune toulousaine, y met du sien : « Deux mondes qu’on n’associe pas se rencontrent. On sort de cette idée que l’univers de la techno est fermé ! » Un enfant danse en tenant les mains de sa mère. Une dame ravie se glisse au plus près de cette foule, encouragée par sa petite-fille : « Mamie, viens on va écouter le son de plus près ! ».

Hors du temps

« T’es concentrée sur tes platines, et de temps en temps, tu lèves la tête et tu te dis que t’es en train de mixer dans cet endroit magnifique, c’est surréaliste ! » s’enthousiasme Clémence, de son nom de scène Lamamona, qui joue avec Mathilde, alias POD.r. Subkultur veut mélanger les arts, comme l’explique son président, Dimitri : « On aime l’expérimentation. On s’appuie sur la musique, mais on ne veut pas mettre les arts visuels au second plan. Pour nous, ces arts forment un tout ». Comme un clin d’œil au plafond peint par Rivalz, qui vaut à la chapelle le surnom de petite-Sixtine, Subkultur a placé l’événement sous le signe du trompe-l’œil. Trois artistes exposent leur interprétation de cette thématique à l’intérieur et à l’extérieur de la chapelle. Charles Mornaud, Taha, alias Spirit et Mathilde Cuchet. À l’entrée, l’association la Station Sauvage a installé un atelier de mapping où chacun projette sa création sur une peinture de la chapelle. Plus loin, une toile tendue invite les visiteurs à dessiner des trompe-l’œil en jouant avec l’architecture. Un petit garçon s’y donne à cœur joie, sous le regard attendri de sa mère : « C’est chouette de découvrir une chapelle moins austère qu’habituellement, avec plus de vie, de bruit ! », s’amuse-t-elle, tout en reconnaissant ne pas être familière de la musique électronique.



Communion

Alors que les dernièrs rayons de soleil percent dans la chapelle, la musique s’arrête. Les lumières jaunes et bleues se figent sur les tableaux, illuminent la Vierge, et les personnages bibliques retrouvent leur calme. Le public s’approche pour profiter des puissantes voix du groupe Soulshinevoices, qui interprète Stand by me et Happy day a capella. « Dans une chapelle, on se recueille, on veut s’évader par l’esprit, méditer. Là, il y a une certaine forme de communion, plus actuelle : se réunir pour expérimenter », observe Dimitri. Après une ovation, les basses reprennent. Une fièvre effervescente s’empare de ceux qui se regroupent devant la scène.


Avec l’arrivée du DJ Cesous et sa House d’inspiration orientale, les jeux de lumières s’intensifient dans une épilepsie de LED. Les motifs projetés rebondissent sur les murs et le plafond. Vêtus de blanc, les membres du collectif de danseurs Experimental Body se meuvent lentement, en décalage avec le rythme, et s’inspirent de la gestuelle des tableaux qui les surplombent. « Le lieu dicte la musicalité et la forme de notre danse », résume son fondateur Alain Caillau, avant de se fondre dans le public.


Il est 20 heures et sur la scène, trois DJs, dont Dimitri, conjuguent leur style. Place ensuite aux adeptes de techno, plus nombreux depuis que la nuit est tombée. Cette techno, dont le rythme s’intensifie, est suivie par une ambiance plus sombre que jusqu’alors. Les LED se font rouge et violette foncé, et un clair-obscur s’installe sous la coupole. Atmosphère irréelle pour un set final qui détone encore plus dans ce lieu chargé d’histoire. Mais cet ensemble est étrangement harmonieux, dans la lignée de ce que revendique Subkultur, « une expérience à contre-pied, mais tout à fait logique. ».





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