Soyons honnête, c’est avec un (léger) a priori que l’on s’est rendu au rendez-vous. Non pas que nous soyons hermétiques au sport à la rédac’ de Boudu. Mais avouons que la performance de Goulwenn Tristant nous a laissés dubitatifs. Comment peut-on s’infliger, quand on est sain de corps et d’esprit, 106,4 km à la nage, 5040 km en vélo et 1181,60 km à pied dans une même année sans autre raison que celle de pouvoir revendiquer le titre honorifique de champion du monde d’ultra-triathlon ?
Ce qu’il y a d’agaçant chez ce pompier de formation, c’est qu’il vous donne toujours la désagréable impression de vous étonner pour quelque chose de banal. Exemple : le travail. Cancre à l’école, il a néanmoins l’ambition, sans diplôme, de bien gagner sa vie. Pour y arriver, il décide de cumuler deux emplois, chez Décathlon le jour et au tri postal la nuit. « Je trouvais dérisoire de ne travailler que 35 heures dans une semaine qui en compte 168. » Idem en ce qui concerne son succès dans l’immobilier. En 2006, il décide d’investir. Problème, il dispose de moins de 1 000 euros en poche. 8 ans plus tard, il possède 25 appartements et un patrimoine estimé à 2 millions d’euros.
Même chose pour son premier Ironman. Alors que la discipline est considérée comme la plus difficile par les athlètes, et qu’elle nécessite à ce titre des années de préparation, il décide de s’inscrire à celui de Nice, en 2011, six mois avant la compétition, sans savoir nager le crawl et sans posséder de vélo. Pis, il assure ne pas avoir modifié sa vie, et avoir continué à faire la fête le week-end. À ce stade, deux options s’offrent à nous : soit on a à faire à un mythomane, soit l’homme a un secret qu’il faut s’empresser de découvrir. Optant pour la deuxième hypothèse, on obtient en guise d’explication un leitmotiv : la volonté. « Si les autres y arrivent, je peux le faire. » La formule a beau être efficace, elle nous laisse un peu sur notre faim. En grattant un peu, on découvre que l’homme est animé par un besoin irrépressible de repousser ses limites. Un concept avec lequel il est d’ailleurs fâché : « Personne n’est capable de dire qu’il les a atteintes. Quand on les touche, on est mort. » S’il était addict, ce serait donc au dépassement de soi. « Depuis que je fais de la compétition, je m’interdis l’abandon et les excuses. À force de franchir des paliers et de m’appliquer ces principes, je me rends compte que rien n’est impossible. Et que je réussis dans tout ce que j’entreprends. » Au risque de se faire mal ? Il s’en défend : « Dans l’ultra-triathlon, je ressens plus de plaisir que de souffrance. D’ailleurs, je n’ai jamais été blessé. J’ai même l’impression que plus je fais de l’ultra-distance, plus je suis en forme. Et puis je ne m’interdis rien. » Vraiment ? S’il jure à qui veut bien le croire qu’il n’a pas de régime alimentaire particulier, il consent néanmoins à reconnaître, presque sans en réaliser la portée, que sa passion n’est pas sans conséquence sur sa famille : « Avec ma compagne, on ne prend pas de vacances. Tout mon temps libre est dédié aux championnats du monde de triathlon. » Certains parleraient d’addiction pour moins que ça…
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