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Mouss et Hakim : ensemble

Dans l’histoire des duos musicaux célèbres, ceux composés par deux frères (ou deux sœurs) ne sont pas si fréquents. Exceptés les légendaires Jackson Five, la fratrie la plus connue est sans doute celle des frères Gallagher. Et le moins que l’on puisse dire est que la relation entre Liam et Noël, malgré les 60 millions d’albums vendus par leur groupe Oasis, n’était pas idyllique. Tout le contraire des frères Mouss et Hakim Amokrane. Mais pour le comprendre, un retour aux origines s’impose. Lorsqu’ils voient le jour Cité de l’Ayga, quartier Jean-Chaubet à la fin des années 1960, à pile un an d’intervalle, cela ne fait que quelques années que leur père, originaire de la montagne de petite Kabylie, à 250 kilomètres à vol d’oiseau d’Alger, a traversé la Méditerranée pour chercher du travail et donner un avenir à celle qu’il aime, au bled. « Notre mère étant plus âgée et ne parvenant pas à avoir d’enfants, leur union était mal vue là-bas », explique Mustapha. Quelques mois à peine après son arrivée en France, à Bordeaux, le père est donc rejoint par celle qui devient sa femme. Elle lui donne miraculeusement son premier enfant, Salah, dans la foulée. Trois autres suivront : Nadia, puis après avoir descendu la Garonne jusqu’à Toulouse, Mustapha et Hakim. Après la Cité de l’Ayga, c’est au 147 bis rue Saint-Raphaël, dans le quartier des Izards, que la famille Amokrane pose ses valises. À l’époque, le quartier, devenu tristement célèbre depuis pour avoir enfanté Mohamed Merah, fleure bon la ruralité : « Il y avait les champs, les maraîchers, les vergers, on entendait le bruit des grillons, se souvient Hakim. On allait se servir dans les serres. Il y avait des vieux avec le béret qui parlaient patois. C’était vraiment champêtre ». Ça, c’est pour le bon côté. Parce qu’aux Izards, la famille Amokrane découvre aussi les joies de la cité d’urgence, spécialement conçue pour les immigrés, où il manque à peu près tout… sauf de l’amour. « On sentait bien que ce n’était pas toujours évident mais on a eu la chance de grandir dans un foyer aimant », mesure Mustapha. Reste que lorsque l’opportunité de déménager dans un HLM Cité Bourbaki se présente, les Amokrane ne laissent pas passer l’occasion : « Dans les appartements, à cette époque-là, il y avait une salle de bain, avec de l’eau chaude, du chauffage central. Tout ce que l’on n’avait pas aux Izards, poursuit-il. Pour nos parents, l’arrivée à Bourbaki a été vécue comme une vraie promotion ».

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Kabyle, la langue du secret Dans le quartier des Minimes, les mois sont parfois difficiles à boucler mais les enfants sont préservés des difficultés se souvient Hakim : « Quand ils avaient des problèmes d’argent, ce qui arrivait souvent bien qu’ils travaillaient très dur, ils se parlaient en kabyle. C’était la langue du secret ». Si les parents Amokrane décident de ne pas apprendre à leur progéniture la langue de leur aïeux, c’est par souci d’intégration : « Aujourd’hui, être polyglotte, c’est super bien. Mais dans leur tête, ils ne voulaient pas que l’on galère. Donc il fallait que l’on parle français ». Comme eux. Parce qu’ils ont beau ne savoir ni lire ni écrire, ils n’en parlent pas moins un très bon français, hérité pour le père de plusieurs années sous le drapeau tricolore en Indochine, et pour la mère d’un passé de fatma (nourrice, ndlr) du temps de l’Algérie française. « De leur génération, c’était eux qui parlaient le mieux, assure Mouss. C’était important pour notre père qui disait toujours : “Je suis né français”. » Outre le fait qu’elle leur confère un rôle de soutien dans le quartier, cette maîtrise de la langue leur permet aussi de jouer un rôle éducatif avec les enfants. Dit autrement, « c’était difficile de les embrouiller, se marre Mouss. Cela a sans doute évité que l’on franchisse certaines limites. Car comme disait notre mère, ” mes enfants, ils font les bêtises mais les conneries, jamais ” ».  Bêtises ou pas, les deux derniers rejetons de la famille Amokrane font tout ensemble. « Jusqu’à l’âge de 15 ans, on dort ensemble, on a les mêmes potes, on se prend les habits, on se tire la bourre », énumère Mouss. Seule variante, le sport. Pendant que l’aîné choisit le foot, la fougue d’Hakim trouve dans le rugby un terrain d’expression idoine à son caractère. Car de ce coté là, les deux frères ne se ressemblent pas, comme le souligne Nadia, la sœur : « Mouss était beaucoup plus posé qu’Hakim qui était sanguin et impulsif. Quand il lui venait quelque chose, ça passait de la tête à la bouche, sans filtre. » Salah, l’aîné, se souvient quant à lui du côté « frimeur » de Mouss : « C’était le beau gosse, qui aimait les belles fringues, les chaussures Minelli très à la mode à l’époque. » À l’école, l’envie de faire plaisir aux parents ne résiste pas longtemps aux sirènes de l’école buissonnière : « Notre père nous répétait pourtant toujours : ” Si tu ne travailles pas bien à l’école, tu vas terminer à la pelle et la pioche, comme moi. ” On rêvait de leur apporter du bonheur, d’être docteur pour amener de l’argent au foyer. Mais on avait aussi envie de s’amuser ». Et s’amuser, ils savent faire, que ce soit sur un terrain de sport ou un dancefloor. Car plus encore que se défouler sur un terrain, c’est se déhancher sur une piste de danse que les frérots Amokrane kiffent. D’autant qu’à 12-13 ans, le hip-hop fait irruption sur les ondes hexagonales, avec notamment l’album Thriller de Mickaël Jackson, un choc pour Mouss, « immédiatement attiré par cette musique funky noire américaine ». Hakim, lui, est plus attiré par le rockabilly et le teddy, au point d’aller en costard à l’école. Mais qu’importe la différence, car c’est la musique dans son entièreté qui prend soudain une grande place dans leur existence : « On était déjà dans une énergie similaire. Je me rappelle que les potes du foot me disaient : “Si tu étais aussi bon au foot que tu danses, ça serait bien !” » Une envie de se donner en spectacle, de se sentir libre que Mouss attribue au climat familial : « On écoutait beaucoup de musique à la maison, ça chantait, c’était joyeux. Mes parents aimaient rigoler et nous voir heureux. Je me souviens notamment quand ma mère chantait “J’ai bien mangé et j’ai bien bu, j’ai la peau du ventre bien tendue, merci petit Jésus ”».

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Des Européens à la maison Salah, le grand frère, joue un rôle important dans la construction de ses frères, en les éveillant à la politique avec les marches pour l’égalité où il les entraîne. L’aîné des Amokrane permet aussi à d’autres musiques, comme le reggae ou le rock, de se frayer un chemin dans l’appartement familial : « Il a indiscutablement ouvert des portes, parfois à coups de pompe. Parce que les parents, même s’ils étaient ouverts, il fallait les bousculer, estime Mouss. Ce qui faisait dire à mon père : “J’ai des Européens à la maison”. » Des Européens qui ne pensent, dès l’adolescence, qu’à danser dans les fêtes, parfois au grand dam d’une mère inquiète lorsque le couvre-feu n’est pas respecté. « Quand le père nous demandait d’être rentré à minuit, Mouss me disait toujours, sur le coup de 2h : “ De toute façon, que l’on rentre à 2h ou à 4h, ça ne change rien, on se fera engueuler pareil ! Donc on rentrera à 4h ” ». Mais les engueulades ne sont pas si fréquentes tant le paternel est rassuré de les savoir ensemble. Car à à l’extérieur du nid, la solidarité entre les frangins joue à plein. « Je ne supportais pas de voir mon frère en difficulté. Dehors, on se protégeait tout le temps. Et ça n’a pas changé en grandissant, je me souviens qu’en tournée avec Zebda ma mère continuait à me dire : “Fais attention à ton frère, tu sais, il est nerveux !” » Treiziste, épidermique, bagarreur, Hakim n’a pas peur de grand-chose. Sur le terrain, c’est ce que l’on appelle un « teignous, fort en bouche » selon son ancien partenaire Laurent Toniol. Mais pas un voyou. « C’était un super mec à qui il tardait une chose : le goûter ». « Même s’il était impulsif, Hakim ne se battait jamais gratuitement », confirme Mustapha. Les occasions de se bagarrer ne manquent pourtant pas pour les frangins, très tôt confrontés au racisme ordinaire. Comme ce jour place du Marché aux Cochons où Mouss, du haut de ses 10 ans, se retrouve soulevé par le colbac par le père d’un gamin avec lequel Hakim se chamaillait : « Il m’a dit en me secouant : “J’ai fait le Djebel (guerre d’Algérie ndlr) !” Ça m’a marqué, j’ai eu peur ». C’est l’amour familial qui leur permet de ne pas perdre leurs nerfs, ni d’alimenter une rancoeur à l’égard de la France : « Quand tu lis dans les yeux de tes parents que tu es important, tu réussis à avancer, à contourner les obstacles, et à ne pas te sentir détruit dans ton identité, confie Mouss. Et puis le prestige de la France, c’est que d’autres te défendent, parfois même de manière plus virulente ». Comme au rugby à XIII où les éducateurs d’Hakim, notamment Jean-Claude Anselme, le protègent de son propre caractère : « Même si j’étais le seul circoncis sous la douche, la question du racisme, je ne me la posais pas. Sinon que lorsque on te traite de bougnoule ou bicot un dimanche sur deux, tu finis par te rendre compte qu’il y a un problème. Mais je ne relevais pas, car les adultes se chargeaient de les faire taire ». Bien dans leurs baskets, Mouss et Hakim se font vite une réputation, dans le quartier, puis rapidement en dehors où ils apprennent à trouver d’autres « figures d’attachement » : « Dès qu’il y a des gens qui nous veulent du bien, on le sent et on va vers eux », illustre Mouss. C’est comme ça qu’ils font office de défricheurs, en étant ceux qui amènent les potes à l’extérieur, notamment à des boums dans d’autres quartiers. En suivant pour cela le précepte paternel : « Quand tu n’as rien à te reprocher, il faut être à l’aise partout. » Ils écument les fêtes de villages mais aussi les concerts au Bikini où le patron, Hervé Sansonetto, les prend rapidement en affection. « J’ai tout de suite vu qu’ils étaient mignons comme tout, plein de vie, ils sautaient partout ». Cette confiance en eux, les frères Amokrane la mettent à profit pour participer activement aux activités proposées par le centre culturel des Izards et l’association Vitécri, qui œuvre pour la promotion des cultures de banlieues, dans laquelle travaille un certain Magyd Cherfi. Séduit par l’énergie débordante du duo, il leur propose de participer au film Zebda Bird, qui raconte les déboires d’un groupe de rock pour trouver un local. « Il nous identifie rapidement comme le relais vers les jeunes du quartier », résume Mouss. Animatrice au Centre culturel des Izards à cette époque, Hélène Mayer se souvient très bien de l’aura des frères : « Tous les jeunes étaient en admiration. Ils étaient très respectés et arrivaient à apaiser, en particulier Mouss qui savait discuter sans s’énerver ».

Le déclic des défilés Concomitamment au tournage du film, leur bonne humeur communicative incite des filles du quartier à leur proposer de participer à un défilé de mode. Un galop d’essai qui agit comme un véritable révélateur. Car pour la première fois, ils décident, sur scène, de montrer leur complicité : « Et ça plait grave aux gens ! », s’exclame Hakim. Le binôme est né et les défilés qui vont suivre vont amplifier le phénomène. Jusqu’à ce que Magyd propose aux jeunes de rejoindre le groupe Zebda, le vrai, avec Joël Saurin et Pascal Cabero. À l’époque, les tout juste majeurs ont abandonné l’école depuis déjà quelque temps. Mustapha, qui vient de passer son Bafa, commence à travailler dans l’animation aux Izards tandis qu’Hakim travaille en intérim où « il met des yaourts dans des cartons, des cartons sur des palettes, et des palettes dans le camion ». Les jobs ne sont peut-être pas très passionnants, mais l’argent rentre ce qui permet de renvoyer l’ascenseur aux parents : « On faisait partie de la génération qui payait la taxe en fin de mois ». Aussi lorsqu’ils informent le paternel de leur désir de se lancer dans l’aventure Zebda, le risque de recevoir une fin de non-recevoir est grand. Mais à la grande surprise de Nadia, la sœur, il leur donne un an pour prouver que ça peut marcher : « J’ai été épatée par sa décision parce qu’à l’époque, saltimbanque, ce n’était pas un métier. Sans compter que pendant un an, pas un rond n’est rentré ».  Portés par leur bonne étoile, et une bonne dose d’insouciance, Mouss et Hakim ne ressentent pas la pression : « Au début, on n’imaginait pas pouvoir en vivre un jour. On le voyait uniquement comme un amusement », assure Hakim. Le rêve pour les frangins, c’est déjà de se retrouver dans des bars où, l’espace de quelques heures, ils sont un peu les stars : « Parce qu’au fond, on est des barbots », reconnaît Mouss. Mais pas que. Parce que Zebda n’a pas son pareil pour donner du plaisir aux spectateurs et enflammer les salles. Partout où ils passent, comme au Corto Maltese à Auch, ils emportent tout sur leur passage. Après avoir triomphé lors de leur premier tremplin en 1988 à la fac du Mirail, ils récidivent un an après en gagnant l’Hexagonal Rock, le tremplin toulousain de musique live, au Tilt, rue Denfert-Rochereau, au nez et à la barbe de tous les groupes toulousains. « C’est la première fois qu’on s’inscrivait, il y avait des musiciens bien meilleurs. Mais on a truc : on retourne les endroits », s’amuse encore, avec le recul, Mouss. En récompense, le groupe gagne 24 heures au studio Arccos au Mirail où il enregistre le 45 tours Cadence. Deux distinctions qui popularisent le groupe à Toulouse, où le moindre bar propose du live : Boulevard du rock, 3 Petits cochons, Petit diable, le groupe enchaine des concerts… sans se projeter dans l’avenir. Ni oser imaginer que la scène puisse être autre chose qu’un terrain de jeu.

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Tremplin rock au début de Zebda. @DR


Le Montesquieu du Bikini Jusqu’au jour où, programmés au Bikini en première partie de Dr Feelgood, un premier déclic intervient. « A la fin du concert, Joël est venu nous donner un Montesquieu (billet de 200 francs, ndlr), se remémore Hakim. C’était notre premier cachet ! Jusqu’alors tout servait à acheter du matos, à mettre de l’essence dans le camion. » Le billet a beau être claqué tout de suite en tournée générale, les frères comprennent qu’ils peuvent gagner de l’argent en faisant ce qu’ils aiment le plus : monter sur scène. « Ça a fait un déclic dans la tronche », certifie Mouss. Tout va dès lors s’accélérer. Dans la foulée, le groupe participe aux sélections pour le Printemps de Bourges. En finale, la concurrence est de haut niveau avec une nouvelle fois tout le gratin toulousain comme les Rosemary’Babies ou Marie et les Antoine, « alors le meilleur groupe de rock à Toulouse » selon Hakim. Mais rien ne semble pouvoir arrêter les Zebda. D’autant qu’à Bourges, ils ne se contentent pas de faire de la figuration. En 1/2 heure de scène, le groupe marque les esprits même si tous ont le souvenir d’un concert moyen. « Mais on s’en tape parce que ce qui compte pour nous, c’est de mettre le feu. C’est ça qui va faire la différence avec d’autres groupes de notre génération plus talentueux », analyse Mouss. « Je me souviens que l’on s’accrochait au rideau sans savoir s’il tenait vraiment ! » complète Hakim. À l’issue du concours, deux groupes découverte sont choisis pour participer à une tournée nationale. Dont Zebda. Même si cette dernière se déroule dans un relatif anonymat et devant un public clairsemé, l’essentiel est ailleurs. Grâce à elle, tout le monde devient intermittent. Un tournant dans l’aventure : « Ces 20 dates nous ont permis de lâcher nos boulots pour ne nous consacrer qu’à la musique. » Mais le groupe ne met pas tous ces œufs dans le même panier. Depuis sa création, il s’est construit sur une conscience aigüe des questions sociales et d’identité auxquelles les frangins Amokrane sont sensibilisés depuis leur plus jeune âge par le militantisme des parents et de Salah, l’ainé de la fratrie et membre actif de Vitécrit : « Il y avait, un peu partout en France, un réseau d’associations de quartier, comme nous, qui organisaient des festivals et invitaient Zebda. C’était Mouss et Hakim qui faisaient le lien. C’est comme si on avait des ambassadeurs sur la route. » Un périple artistico-militant qui les voit gagner un tremplin à Bondy, dans le 93, avec comme récompense le privilège de faire la première partie de la Mano Negra. Un deuxième déclic après le Montesquieu du Bikini. Car dans le groupe il y a un Stéphanois, Wali, qui va immédiatement adopter les frangins Amokrane. « Du coup, on devient pote avec Manu Chao qui nous impose partout en première partie de ses concerts, notamment à la Patinoire de Blagnac où l’on joue devant 5000 personnes ». Et à la suite d’une nouvelle victoire lors d’un tremplin, en 92, à Paris, ils se font repérer par un Ecossais, Peter Murray, qui vient de rencontrer le succès avec les Négresses vertes et Elmer Food Beat, qui les fait signer avec Nord-Sud, un sous-label de Barclay. Le début d’un autre monde. Hébergé pendant 40 jours au studio du Manoir à Léon dans les Landes pour enregistrer leur premier album L’Arène des rumeurs, le groupe découvre « un niveau de luxe comme on n’en a jamais eu » se souvient encore Mouss. À sa sortie dans les bacs, l’album ne rencontre pas le succès escompté. Logique pour Joël Saurin pour qui le passage en studio a sans doute été un peu prématuré : « Personne n’était prêt ! On était un groupe de bar qui se cherchait… et qui ne s’était pas encore trouvé ! »

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Prolonger l’enfance Qu’importe parce que Zebda, tout le monde les veut dans sa salle ou festival. Et les tournées s’enchainent avec bonheur, surtout pour les deux frères qui n’aiment rien tant qu’aller à la rencontre de nouveaux publics. Et qui peuvent compter l’un sur l’autre dans les moments difficiles : « Avoir son frère en face de soi au petit-déjeuner, c’est comme si tu amenais la maison avec toi partout », poétise Hakim. Avec Zebda, on a prolongé l’enfance. A l’âge où les frères s’éloignent un peu, on s’est retrouvé au même endroit ensemble. » Et ensemble, c’est tout sauf un détail dans le contexte d’alors. Car le groupe a beau tendre vers le même objectif, ses membres n’en sont pas moins différents. Des égos certes, mais pas de jalousies certifie Mouss. « Et puis on tire tous dans le même sens parce qu’on sent qu’il y a quelque chose à faire ». N’empêche qu’apparait, dès ce moment-là, l’idée du fruit à plusieurs noyaux : « C’est ça un vrai groupe. Dans Zebda, Magyd écrit les textes, Joël organise tout. Et nous, c’est l’énergie. Notre talent, c’est de savoir se faire aimer ». Une énergie dont Hakim et Mouss vont faire profiter les autres lorsqu’ils créent, avec notamment Jean-Luc Amestoy, Serge Lopez et Bernardo Sandoval, les 100 % Collègues. Au contact de musiciens talentueux et chevronnés, les frangins apprennent la musique. Serge Lopez se souvient : « Au début, ils étaient intimidés quand on répétait. Il faut dire qu’ils partaient de loin. Par contre, une fois sur scène, c’était la grosse surprise ». Un avis partagé par Bernardo Sandoval : « J’étais époustouflé par leur manière d’attraper le public. Leur envie de partager était incroyable. » Conscients de leurs lacunes, ils redoublent d’efforts pour se mettre au niveau : « Ils se sont bien accrochés et ont beaucoup bossé, raconte Lopez. Parce qu’ils ont vite compris que cela ne nous aurait pas intéressé longtemps s’ils avaient continué à chanter comme au début ». Une pige néanmoins diversement appréciée par les camarades de Zebda comme le concède aisément Joël Saurin : « Sur le moment, je considérais qu’il ne fallait pas qu’ils se dispersent. Mais avec le recul, je reconnais qu’ils en avaient besoin pour respirer. Et que cela a été profitable au groupe ». Pour Rémi Sanchez, chargé des arrangements musicaux à partir du Bruit et l’odeur, l’aventure 100 % collègues a été un révélateur pour Mouss et Hakim : « C’est un tournant dans leur carrière. 100 % a été la période la plus formatrice pour eux : en se confrontant à des musiciens très inspirants, ils ont changé d’univers ». Les principaux intéressés n’en restent pas moins 100 % Zebda. Même si cette (légère) infidélité leur permet de prendre conscience, à partir de ce moment-là, « de notre potentiel à deux » avoue Mustapha. Mis en confiance par la parenthèse des Collègues, le « noyau jeune » de Zebda, rejoint par Rémi Sanchez, prend du galon lors du deuxième album, Le Bruit et l’Odeur, qui voit le groupe bénéficier de l’apport de Jean Haas, producteur de hip-hop. Contrairement au premier opus où ils étaient essentiellement cantonnés aux cœurs, ils se mettent à chanter seul ou en duo. « À partir du Bruit et l’Odeur, Magyd se met à penser les textes pour trois, confirme Joël Saurin. Et ils ont été tout de suite très à l’aise avec les samples (amenés par Jean Haas) jusqu’alors très utilisés par les groupes de hip-hop. » « On commence à s’affirmer et à devenir des artistes », avance Mouss. Un avis partagé par Nadia, la grande sœur : « Au départ, c’était les ambianceurs. Ils ont pris une autre place dans le deuxième album parce qu’ils se sont professionnalisés ».

Le succès de Motivés Sans casser la baraque en termes de vente, le Bruit et l’Odeur connaît un vrai succès d’estime. Et les frangins continuent d’occuper le terrain. Avec Zebda, bien sûr, mais aussi avec les Collègues qu’ils embarquent dans une nouvelle aventure, militante cette fois, au travers de l’album Motivés, où ils se mettent en tête de mettre en musique les chants révolutionnaires comme Bella Ciao ou Hasta Siempre. Un mélange d’intuition, de conviction et de familial… comme souvent avec les frères Amokrane. Le succès est aussi inattendu qu’impressionnant. Quelques semaines après avoir enregistré l’album, la chanson Motivés retentit, en pleine occupation des Assédics, au JT de 20h.

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Le réseau militant a fonctionné à plein. À partir de ce moment, Motivés devient l’hymne des manifs et de la résistance. Et l’album se vend à 200 000 exemplaires, tout en auto-production et en vente directe. Un carton commercial dont ils ne tirent aucun bénéfice financier puisqu’ils renoncent, comme les autres artistes, à prendre le moindre cachet. « Pourtant les maisons de disques ont accouru quand elles ont compris que ça allait devenir un gros succès, se souvient Salah, coordinateur du Tactikollectif. Mais ils n’ont rien voulu changer. » Galvanisés par le succès de Motivés, les frères enchaînent dans la foulée avec l’enregistrement d’Essence Ordinaire, l’album de la reconnaissance nationale et internationale de Zebda avec plus de 600 000 exemplaires vendus (un million avec les singles), deux Victoires de la Musique (celles de meilleur groupe et de meilleure chanson) et une tournée dans tous les Zéniths de France. « On est en haut du mât et on sonne la cloche, aime à imager Mouss. On est comme des dingos, on prend de la monnaie comme on n’aurait jamais osé en prendre, on met le feu partout, les gens connaissent les chansons, c’est populaire. » Trop aux yeux de certains qui ont du mal avec la médiatisation de Tomber la chemise. « Mais pour nous, le succès de Tomber la chemise, c’est le succès de l’énergie du groupe. Et l’énergie, c’est nous. » « Quand on l’entend dans un bal, c’est un aboutissement, insiste Hakim. Parce que le bal populaire, c’est le blues des Français comme disait Bashung ! » 20 ans après, Joël Saurin peine encore à analyser le phénomène : « Avec la tournée des Zénith, on rentre dans le show-business, on attire un nouveau public qui ne connaît pas forcément notre répertoire. Ce succès, j’en rêvais tout autant. Mais je crois qu’ils l’ont mieux vécu que nous. » Sans s’en apercevoir, trop occupés à profiter de l’instant présent, Mouss et Hakim ne se rendent pas compte que c’est le début de la fin. Toujours fortement impliqués dans la vie du Tactikollectif, ils décident de se jeter dans l’arène politique en créant la liste Motivé-e-s avec leur grand frère Salah aux élections municipales de 2001. Pour montrer l’exemple mais aussi renvoyer l’ascenseur, encore une fois : « On s’est toujours servi de la notoriété de Zebda pour faire des choses pour le quartier », justifie Mustapha. Pas question cependant pour les frères Amokrane de n’être que des prête-noms. Tête de liste des Motivé-e-s, Salah se souvient : « Ils ont été hyper présents, chacun à leur manière, ils ont participé dans les réunions, ont donné leur point de vue ».

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Les années creuses Cette campagne, longue de 8 mois, ils vont la vivre avec la même intensité que sur scène : « Cela a été l’une des plus belles expériences de notre vie, s’enflamme Mouss. On a vu une dynamique se créer, naître l’espoir de voir les choses changer, le retentissement national et même international du mouvement avec des articles dans Libé, le Times, El Pais ou Herald Tribune. Ça a été hyper stimulant et agréable de se servir de notre notoriété pour pouvoir tourner la lumière. » La défaite a beau être au rendez-vous, l’expérience est enivrante. Le retour à la réalité n’en est que plus délicat. Car au sein de Zebda, l’édifice se lézarde. Alors que les frères Amokrane se verraient bien surfer un peu plus sur l’engouement populaire, le canal historique du groupe veut tourner la page de Tomber la chemise pour se replonger dans un nouvel album. Au point de rentrer en résidence sans Mouss et Hakim, encore en tournée avec les Collègues. Tout un symbole. Les divergences commencent à apparaître au grand jour. « Tout le monde fait de son mieux mais il n’y a pas le même enthousiasme que pour les précédents. C’est laborieux », se souvient Mouss. Les aspirations ne sont tout simplement plus les mêmes. « On sent qu’il y a une volonté de contrebalancer le côté festif, voire militant de Zebda », précise Hakim. Une impression confirmée par Joël Saurin : « On était un peu obsédés par l’idée de ne pas faire le petit frère de Tomber la chemise ». De fait, avec la sortie d’Utopie d’occase en 2002, album plus sombre, Magyd a clairement repris le leadership. Et la rupture semble bel et bien consommée. Après une tournée moins triomphale que les précédentes, les membres du groupe décident, en 2003, de faire un break. Conscients de la nécessité de donner une respiration à chacun, le coup n’en est pas moins difficile à encaisser : « Je pense que l’on aurait été capables de maintenir Zebda au plus haut pendant des décennies… », regrette encore aujourd’hui Hakim. Alors que Joël choisit d’accompagner Magyd dans son album solo, le trio des jeunes décide de continuer l’aventure ensemble et de se projeter, eux aussi, sur un album, le premier des frangins. Mais le plaisir pris à le concevoir ne suffit pas. Mouss&Hakim ou le contraire n’est pas à la hauteur des espoirs. « On l’a peut-être fait pour de mauvaises raisons, comme si on avait quelque chose à prouver, en oubliant qu’elle était notre force », tente d’analyser, avec le recul Mouss. Hakim est plus direct : « Avec le premier album, on a fait du sous Zebda. » L’album ne marchant pas, la tournée qui s’ensuit est au diapason. Avec parfois des salles qui sonnent creux : « Jouer devant 50 à 100 personnes après avoir connu des Zénith, ce n’est pas toujours évident », reconnait Mouss. Rémi Sanchez va plus loin : « Le retour à la normale est terrible. Mais sur scène, ils ne montrent rien. Ils gardent la même énergie, y compris devant 20 personnes ». « C’est une frustration parce que l’on reste ambitieux, avance Hakim. Mais la frustration fait grandir. » Il en faut plus pour avoir raison de la ténacité des frérots qui trouvent, une nouvelle fois dans leur complicité, la force de continuer à y croire : « À aucun moment on se demande pourquoi on est là. On se soutient, on est dans l’amour fraternel. On est solides parce qu’on est ensemble. Quand il y en a un qui est un peu down, l’autre sait comment le ramener dans le truc. Et puis quand on a l’opportunité de jouer devant 10 000 personnes, comme au Sziget à Budapest, on voit que l’on arrive encore à enflammer le public ». Reste à retrouver la bonne formule. Et c’est presque par hasard qu’ils vont la trouver. Alors qu’ils travaillent intensément depuis plusieurs mois sur un nouvel album, le départ d’un des membres à Tahiti pendant 15 jours les oblige à faire relâche. Dans l’intervalle, ils s’envolent pour un concert de soutien contre la marée noire avec quelques musiciens dont Rachid Bennallaoua. Quelques morceaux kabyles suffisent : « En descendant de scène, on se dit qu’on a retrouvé notre singularité », résume Mouss. Et surtout le plaisir pour Rémi Sanchez : « On a tout de suite vu qu’ils avaient retrouvé l’énergie ».  Sans hésiter, ils décident de jeter à la poubelle l’album qui était pourtant quasiment terminé. Sans regret, ou presque : « Il était globalement dans la même veine que le précédent », assure Mustapha. En plein débat sur l’identité nationale, les frères Amokrane décident de rendre le plus bel hommage qu’il soit à leur père en reprenant les chansons préférées de son enfance. « Même si mes parents ont tout fait pour faciliter notre intégration, on a toujours vécu dans le mythe du retour. Sans qu’ils aient besoin de le dire, on comprenait que chez eux, c’était là-bas, éclaire Mouss. Même si on n’était pas malheureux ici, on a grandi avec l’idée que l’Algérie, c’était LA terre d’origine. » Pour Nadia, la grande sœur, cet album était une évidence : « Ce projet, c’était inenvisageable qu’il n’existe pas dans la carrière de Mouss et Hakim, qu’il n’y ait pas cet hommage à ce que nos parents nous ont transmis. Car s’ils sont artistes, c’est aussi parce que l’on a écouté de la musique toute notre vie ». Pensé comme un hommage, Origines Contrôlées rencontre un succès fulgurant. Pour Rachid Bennallaoua, musicien qui a fait office de prof de berbère sur le projet, c’est le regard porté sur les frères Amokrane qui change alors : « L’album les a remis en lumière en France, et les a consacré en Algérie. La chanson Maison Blanche, par exemple, a marqué les esprits ».

boudu-59-Hakim et Mustapha Amokrane

@Rémi Benoit


Origines Contrôlées, le renouveau S’ouvre alors une période faste de 400 concerts, de 20 000 albums vendus en merchandising, d’un documentaire réalisé avec le père, et du sentiment d’avoir repris le flambeau de l’engagement et « remis du sens dans ce que l’on fait, selon Mouss. Depuis le début des années 2000, on sentait bien que l’on faisait évoluer notre militantisme vers les questions de mémoire et d’identité. Au fond, c’était assez logique : en tant que deuxième génération, on était les premiers à prendre la parole pour raconter cette histoire ». Rassérénés par le succès d’Origines Contrôlées, Hakim et Mouss renouent, au début des années 2010 avec Magyd et le reste du groupe. Tout simplement, « parce qu’à un moment Zebda nous manque et que l’on ne s’est pas vu pendant 7 ans ».  Second Tour, l’album des retrouvailles, est une réussite (Disque d’or 2012) tout comme la tournée qui s’ensuit avec le retour de Zebda dans les plus gros festivals hexagonaux, des Francofolies aux Vieilles charrues, en passant par le 14 juillet à Toulouse. Mais les équilibres au sein du groupe ont changé comme le reconnaît Joël Saurin : « Quand on se retrouve, Mouss et Hakim ont pris de la maturité, ils veulent être là complètement, prendre toute la place. » Les egos, enfouis, ressortent à la surface. « Sur Origines Contrôlées, Mouss et Hakim ont été leaders et ils ont envie de continuer à l’être dans Zebda. Comme Magyd, Joël… Bref chacun a envie de faire les choses à sa manière », analyse Rémi Sanchez. Et le soufflé retombe vite. Dès le deuxième album, l’alchimie collective n’y est plus . « Les retrouvailles sont terminées », résume Mouss. À l’issue d’une tournée poussive, marquée par le décès du père à Alger, où les frères se produisent pour la première fois et où est projeté, à la cinémathèque d’Alger le documentaire Origines Contrôlées, le groupe décide, à l’automne 2015, pour la deuxième fois, de s’arrêter. Définitivement ? Personne ne se risque à l’affirmer. Car pour tous, « Zebda est éternel ». Cette seconde séparation, Hakim et Mouss vont la vivre plus sereinement. Et répondre avec gourmandise aux nombreuses sollicitations dont ils font l’objet : Brigitte Fontaine, Tikken Jah Fakoly, La rue Kétanou, les Ogres de Barback, M, la BO d’I Feel good, le film de Kervern et Delépine, ils développent un côté tout terrain « que l’on n’avait pas avec Zebda » et qui sied à merveille à leurs aspirations. « Chaque fois que l’on nous invite, on déboule », sourit Mouss. Sans oublier, bien entendu, la militance, toujours au cœur de leurs préoccupations avec la reprise d’une tournée Motivés et les actions de terrain, encore et toujours. Comme à Arnaud Bernard où ils mouillent la chemise pour aider Rachid Bennallaoua à lancer son café associatif Maison Blanche : « Si tu ne les quittes pas, ils ne te laisseront jamais tomber, témoigne-t-il. Ils sont très fidèles ». Une fidélité également louée par Christian Bourgault. Producteur de l’album Origines Contrôlées avec sa maison Blue Line, il s’attend, lorsque Zebda se reforme en 2011 à devoir s’effacer devant plus costaud que lui. « Tout le monde voulait les récupérer ». Mais à sa grande surprise, ils font le choix de continuer avec lui : « Parce qu’ils sont comme ça, sincères, vrais, authentiques. Ce sont des artistes qui ne font jamais le moindre caprice, très réalistes sur ce qu’ils sont. » Parce que dans le fond, Hakim et Mustapha Amokrane n’ont pas changé assure Nadia, la grande soeur : « Comme aurait dit mon père, “ Grâce à Dieu, ils n’ont pas pris la grosse tête ”. Au quartier, ils sont chez eux. À aucun moment ils n’ont oublié d’où ils venaient, les potes, les familles. S’ils n’avaient été qu’artistes, leur carrière aurait sans doute été encore plus explosive. Mais cela n’aurait pas été eux ». Un avis évidemment partagé par Tayeb Cherfi, l’un des piliers du Tactikollectif, l’association qui a produit le CD Motivés et qui participe, depuis 20 ans, à la vie culturelle, associative et militante toulousaine : « Ils n’ont jamais lâché le terrain. Même à l’âge d’or de Zebda, où ils étaient très occupés, ils restaient pleinement impliqués dans les actions. Je ne connais pas d’artistes qui sont restés aussi simples malgré leur notoriété ».

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Dans leur antre des Minimes. @Rémi Benoit


Un cadeau tombé du ciel Aussi simples mais aussi soudés. Pour Christian Bourgault, une telle fraternité est unique dans l’histoire de la musique : « Je ne connais pas d’histoire similaire : avoir une telle complicité, une telle générosité sur scène, c’est incroyable. Ils sont totalement indissociables. Et sans doute pas suffisamment reconnus. » Car pour le producteur de Blue Line, le moment est venu pour les frères Amokrane de montrer les muscles : « Leur nom n’ a pas suffisamment été mis en avant jusqu’à maintenant alors que ce sont les moteurs et la force vitale de tous les projets auxquels ils ont participé. Je crois que ce duo a beaucoup d’avenir devant lui. » Une intuition partagée par d’autres à commencer par la famille Nougaro lorsque celle-ci leur propose de mettre en musique des textes inédits de Claude. Une proposition qui tombe à point nommé pour le duo qui travaillait depuis de longs mois à l’évolution de leur style musical. « Un cadeau tombé du ciel », n’hésite pas à dire Mouss. Sauf que depuis la disparition de Claude Nougaro en mars 2004, les tentatives de mise en musique de textes inédits du poète ont été nombreuses… et rarement couronnées de succès. Le défi est donc majuscule. Tayeb Cherfi reconnaît d’ailleurs avoir eu peur qu’ils « folklorisent le répertoire de Nougaro ». Mais le projet Darons de la Garonne est différent des précédents. D’abord parce qu’il prend racine dans la fraternité des faubourgs (le quartier des Minimes dans lesquels ils ont tous grandi) ; ensuite parce qu’il se nourrit d’une histoire commune, Nougaro leur ayant écrit en 2002 le texte Bottes de banlieue ; enfin parce que le choix de Mouss et Hakim est une évidence pour la famille Nougaro comme l’explique Hélène Bignon, sœur cadette et éditrice de Claude Nougaro : « Il émane d’eux un enjouement qui donne envie de danser. Ce qu’il y a de touchant, c’est que ce sont des frères, et que leur amour se ressent. Claude était très touché par l’amour fraternel. C’est un thème qui comptait beaucoup pour lui ». L’amour, la fraternité, l’enfance, les thèmes de ces textes vont en effet comme un gant à Mouss et Hakim qui s’emploient, après avoir reçu la reconnaissance et le succès, à transmettre à leur tour. Une démarche à laquelle Cécile Nougaro est particulièrement sensible : « Je retrouve en eux ce petit côté espiègle qu’avait mon père, et qui fait que Bottes de banlieue est un mariage parfait. Ils font naturellement le lien entre l’œuvre de Claude Nougaro et le public d’aujourd’hui.» Pour Serge Lopez, le legs est amplement mérité : « C’est sûr que mettre en musique des textes de Nougaro, tous les artistes toulousains en rêvent. Parce que c’est l’exemple pour nous tous. Mais il n’y a pas de raison d’être jaloux. Car de son vivant, Claude appréciait ce que portaient Hakim et Mouss »

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@Rémi Benoit


Elle me versait le lait caillé Dans un récipient émaillé Que je tendais, noir écolier Entre mes doigts pleins d’encrier Elle me versait le lait caillé Que je tendais, noir écolier Entre mes doigts pleins d’encrier Extrait du titre « Le Lait Caillé » nouvel album « Darons de la Garonne »

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