Sans doute du fait des origines helvètes de son directeur artistique, le festival Toulouse les Orgues a désormais tous les attributs du couteau suisse : protéiforme, rond en surface, pointu à l’intérieur, et relevant à la fois du patrimoine et de la culture pop. Après avoir glissé les riffs rock de Zappa et les airs pop de Pink Floyd dans les tuyaux des églises toulousaines, Yves Rechsteiner, pur produit du conservatoire pas versé dans le conservatisme, y fait souffler cette année un vent de folie. Sa programmation, bâtie comme un remède à la tempérance, célèbre le caractère hors norme des organistes, leur relative démence, et la démesure de leur instrument.
On y découvrira les Mad Songs, spécialité anglaise déroutante du XVIIe siècle, et le tout aussi déroutant Cathedral Mobile de Jacob Lekkerkerker, qui se joue de la perception du public et transformera la cathédrale Saint-Étienne en terrain de jeu sonore. Mais ce qu’on attend avec le plus d’impatience, c’est la projection à Saint-Sernin de L’étroit mousquetaire de Max Linder (géniale parodie muette de Dumas sortie en 1922, avec gags préludes aux Monthy Pythons et anachronismes délirants) mis en musique en live par l’organiste slovaque Monica Merlova. La rencontre d’un gagman star des années folles, d’un bijou patrimonial toulousain et d’une virtuose de l’impro.