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Anissa Benyoub : « Ici, je suis Anissa-la-boxeuse »

Après avoir fait ses armes au Boxing Toulouse Bagatelle, la boxeuse pro Anissa Benyoub a décidé de transmettre les valeurs du club en entraînant à son tour. La multi-championne de 29 ans raconte son attachement au B.T.B.




Annissa Benyoub, comment l’idée de pousser la porte d’un d’un club de boxe vous a-t-elle traversé l’esprit ? 

J’étais un peu l’ado feignante sur les bords. Mes parents voulaient que je fasse du sport. Comme j’avais beaucoup d’énergie et de colère en moi, l’école m’a orientée vers la boxe. J’ai poussé la porte du club à côté de chez moi un peu par hasard. Finalement, dès le premier entraînement, j’ai vu que j’étais douée et que mes entraîneurs m’aimaient bien. Alors, je suis restée.

 

Jusqu’à devenir pro ?

Très rapidement. Vu qu’il fallait attendre 18 ans pour passer le diplôme d’entraîneur, j’ai commencé à être entraîneur stagiaire à 16 ans. Puis dès que j’ai pu, j’ai passé un prévôt fédéral et un BPjeps avec l’aide du club pour me professionnaliser parce que j’aimais ce sport, les gens, je me sentais à l’aise et puis surtout, on me donnait ma chance. Quand on grandit dans un quartier, on t’associe souvent à une autre personne. Je suis la sœur de, la fille de, la nièce de… Ici, au Boxing Toulouse Bagatelle, que ce soit avec mes entraîneurs ou mes camarades boxeurs, je suis Anissa la boxeuse.


Vous aviez besoin de cette reconnaissance ?

Je ne savais pas que j’en avais besoin, mais maintenant que je l’ai, je sais que c’est important pour moi d’avoir mon identité, mes lieux, mon groupe et mes liens.


Qu’est-ce qu’il a de particulier ce club ?

Son accompagnement. Pas seulement sportif mais aussi psychologique. Quand ça ne va pas bien dans ma vie, ça se voit sur le ring. Pour que je donne le meilleur, il fallait que mes entraîneurs trouvent ce qui n’allait pas. Et ils y arrivaient ! Avec Adama et Éric, que j’appelle mes papas, je peux parler de tout, de mes problèmes de couple, amicaux, scolaires, professionnels… Ils pouvaient aussi nous accompagner financièrement et nous aider avec l’école. Un de mes entraîneurs venait me chercher tous les samedis matin pour réviser mes maths à la BU. Ils m’ont aussi aidé à financer mon permis… Tout un tas de trucs qui n’ont rien à voir avec le sport. Ils sont prêts à mettre de leur poche pour nous !


Vous auriez pu vous contenter de boxer en club. Pourquoi avoir franchi le pas de la compétition ?

Six mois après avoir commencé, j’ai été médaillée d’argent au championnat de France. J’avais perdu contre la championne olympique Estelle Mossely. En 2006, j’ai terminé en finale. Puis en 2008-2009, on m’a sélectionnée pour l’équipe de France jusqu’en 2013 où j’ai eu mon fils. Quelques années après, j’ai intégré l’équipe d’Algérie pour avoir une chance de faire les Jeux olympiques. J’ai été championne d’Algérie deux fois. C’était intéressant de voir comment ça se passait ailleurs et notamment en Afrique où il n’y a pas forcément les mêmes moyens et où la place de la femme n’est pas la même. C’était une expérience extraordinaire. Toutes les ceintures que je gagne, c’est aussi pour remercier mes entraîneurs, car je ne suis pas arrivée là toute seule.

Anissa Benyoub contre Elsa Hemat en 2021


Vous avez d’ailleurs été l’une des premières femmes à rejoindre le club. Comment cela s’est-il passé ?

On était un noyau d’une dizaine de filles ce qui, 15 ans en arrière, faisait déjà beaucoup. Quand je rentre dans la salle, il n’y a ni fille ni garçon, il y a juste des camarades de boxe. Cet état d’esprit, je l’ai grâce à mes entraîneurs qui m’ont fait boxer contre un garçon ou une fille, contre une Françoise ou une Aïcha sans aucune différence. Aujourd’hui, je n’ai ni peur du regard de l’homme ni de celui de la femme et c’est grâce à la boxe et à la mixité rendue possible par le club.


Pourquoi avoir décidé de créer des sessions réservées aux femmes ?

J’ai eu accès au monde sportif assez facilement parce que ma sœur faisait du foot et que mes parents me poussaient à en faire. Mais pendant mes 15 années de boxe, j’ai pu voir que l’accès au sport pour les femmes était difficile. Tu es une fille ? Alors tu vas faire de la danse ! C’est pour ça que j’ai choisi de me spécialiser. Je pense que les femmes ont besoin de ce moment-là entre elles pour avoir confiance en elle, en leur corps, en leur potentiel avant de pratiquer un sport mixte.

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