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Un peu de podcast, beaucoup d'audace

Sébastien Vaissière

En quête de bras, de têtes et de jambes, le secteur agricole cherche, au-delà du milieu paysan, des candidats suffisamment audacieux pour le rejoindre. Sur le site toulousain de la Chambre d’agriculture d’Occitanie, Yasmina Azmy, chargée de l’orientation et de la formation, use pour cela de deux outils ancrés dans l’époque : l’escape game et le podcast.

Yasmina Azmy, chargée de l’orientation et de la formation de la Chambre d'agriculture - Photo : Rémi BENOIT
Yasmina Azmy, chargée de l’orientation et de la formation de la Chambre d'agriculture - Photo : Rémi BENOIT

Y a-t-il en France beaucoup de bons agriculteurs potentiels qui s’ignorent ?

Bien sûr, et c’est la raison pour laquelle nous cherchons à les aider à franchir le pas.


Pourquoi ne le franchissent-ils pas de leur propre chef ?

Certains craignent que ce soit trop compliqué. Les autres pensent que ce n’est qu’un rêve. À cela s’ajoutent le manque de culture de l’entreprenariat en France, tous secteurs confondus, et la méconnaissance du secteur. Un mélange paradoxal d’insuffisance et de trop-plein d’informations.


Comment travaillez-vous à y remédier ?

En montrant aux porteurs de projet qu’ils ne sont pas seuls, et qu’on peut les aider efficacement en fonction de leur situation. Selon qu’ils sont scolarisés ou non, salariés ou demandeurs d’emploi, les dispositifs, les aides, les interlocuteurs et les chemins

à prendre seront différents.


De quoi manque-t-on le plus en Occitanie ?

De candidats à la reprise. Seulement 68% des cédants trouvent un candidat à l’installation sur leur exploitation. On manque aussi cruellement

de conducteurs d’engins agricoles. Le secteur en manque et ils sont très recherchés !


Pourquoi, au cours de la scolarité, n’entend-on pas davantage parler des métiers agricoles ?

Les facteurs sont nombreux. Le Carif-Oref de Nouvelle-Aquitaine a mené cette année une enquête auprès des prescripteurs de l’orientation professionnelle.

Elle montre qu’il y a chez ces derniers un défaut d’information et une méconnaissance des métiers agricoles qui ne contribuent pas à les rendre attractifs.


La perspective de faibles revenus aggrave-t-elle ce manque d’attractivité ?

Quand on se livre à ce genre de comparaisons, on oppose généralement le salaire d’un chef d’exploitation à celui d’un salarié, ce qui n’est pas tout à fait la même chose. Si l’on comparait le salaire d’un agriculteur à celui d’un chef d’entreprise de TPE, la différence serait déjà moins nette.


On a l’impression que le Covid a fait office de déclencheur pour nombre de candidats hésitants. Cela se vérifie-t-il dans les chiffres ?

En sortie de Covid, nos points accueil-installation ont été submergés de demandes. C’était pour nous une vraie révolution.


Ces porteurs de projet sont-ils allés au bout ?

On pourra en juger dans quelques années : il faut trois ans en moyenne pour mener à bien un projet d’installation.


Quel est leur profil ?

Souvent des cadres de secteurs non agricoles, âgés de la quarantaine. C’est une tendance qui confirme celle des établissements de l’enseignement agricole, où l’on trouve de moins en moins d’enfants d’agriculteurs.


Entre 2022 et 2024, vous avez réalisé 17 épisodes d’un podcast intitulé Trajectoires agricoles, ils ont osé ! Était-ce une façon de coller aux habitudes de l’époque ?

On avait fait le tour des actions et des médias classiques. Il nous fallait les compléter par des outils nouveaux, que la Région Occitanie nous a aidés à bâtir. D’abord des escape game à la ferme et en ligne destinés aux lycées, aux collèges et aux candidats à la reconversion. Ensuite un podcast, moyen de porter l’information jusqu’à son destinataire quand lui-même le décide. Il consiste en une série de témoignages de professionnels de l’agriculture. Il est enrichi par un livret co-rédigé avec nos partenaires des secteurs de l’emploi et de la formation en agriculture. Il explique pas à pas comment s’y prendre et quels dispositifs d’aide viser.


À l’image des campagnes de pub de la Chambre d’agriculture, votre podcast appelle à « oser » l’agriculture. Pourquoi faire appel à l’audace plutôt qu’à la raison ?

Si la période Covid a redoré le blason des agriculteurs auprès de la population française, le secteur reste mal connu et peut faire peur. On ne connaît pas son fonctionnement, on ignore le fonctionnement de l’enseignement agricole… Il faut donc de l’audace pour se lancer.


L’audace est-elle la principale qualité que vous avez retrouvée chez les agriculteurs interviewés pour le podcast ?

Plus encore que leur audace, ils ont en commun la ténacité et l’humanité. Et la conscience, également, qu’une installation en agriculture n’est pas une simple orientation professionnelle, mais un projet de famille et de vie



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